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Comment un journaliste a reçu des plans de guerre des US par erreur sur Signal

Un journaliste américain explique avoir été ajouté par erreur à une discussion de groupe touchant à la sécurité nationale, sur la messagerie chiffrée Signal. Dans cette conversation, le patron de la CIA et le vice-président américain discutaient des frappes militaires à venir au Yémen.

« Les responsables de la sécurité nationale des États-Unis m’ont fait participer à une discussion de groupe (Signal, NDLR) sur les frappes militaires à venir au Yémen. Je ne pensais pas que cela pouvait être possible ». Lundi 24 mars, un journaliste américain a révélé qu’il a été ajouté par erreur à un groupe de discussion sur la messagerie chiffrée Signal. L’occasion pour Jeffrey Goldberg, rédacteur en chef de The Atlantic de connaître le plan détaillé de frappes aériennes contre les rebelles houthis au Yémen menées le 15 mars dernier… deux heures avant que le raid ne commence. « Des informations précises sur les armes, les cibles et les horaires » ont aussi été partagées.

Tout a commencé le 11 mars dernier, explique-t-il. Le rédacteur en chef est contacté sur Signal et ajouté à un groupe qui compte 18 personnes au total, dont Marco Rubio, le patron de la CIA, John Ratcliffe, et le vice-président, J.D. Vance, explique-t-il. Selon le journaliste de The Atlantic, le vice-président américain aurait expliqué qu’un tel raid aérien serait une erreur. L’opération rendrait le transport de marchandises en mer Rouge plus sûr, ce qui bénéficierait surtout aux Européens.

« Je ne pouvais pas non plus croire que le conseiller du président (…) serait assez imprudent pour inclure le rédacteur en chef de The Atlantic »

Or, « je déteste venir au secours des Européens encore une fois », aurait écrit J.D. Vance. Le secrétaire à la Défense aurait alors répondu : « Je suis complètement d’accord, je déteste le comportement de profiteurs des Européens. C’est PATHÉTIQUE ». Mais il aurait ensuite confirmé qu’il fallait bien mener l’opération pour « rouvrir les liaisons » maritimes, toujours selon le média américain.

Face à ces messages, le journaliste américain pense d’abord qu’il s’agit « d’une opération de désinformation ou d’une sorte de simulation » faite pour le piéger. « J’avais de très forts doutes quant à l’existence de ce groupe de texte, car je ne pouvais pas croire que les responsables de la sécurité nationale des États-Unis communiqueraient sur Signal à propos de plans de guerre imminents. Je ne pouvais pas non plus croire que le conseiller du président en matière de sécurité nationale serait assez imprudent pour inclure le rédacteur en chef de The Atlantic dans de telles discussions avec de hauts responsables américains, y compris le vice-président », explique-t-il. Ce média est très critiqué par Donald Trump en personne. Mais lorsque les frappes aériennes sont confirmées par les médias, le journaliste comprend qu’il s’agit réellement d’un groupe de discussion authentique. Après le raid aérien, le rédacteur en chef décide de quitter le groupe.

Il a ensuite envoyé plusieurs questions aux destinataires du groupe, des interrogations restées sans réponse. Le journaliste en a profité pour demander si les membres du gouvernement Trump utilisaient régulièrement Signal pour des discussions sensibles, et si ces responsables pensaient que l’utilisation d’un tel canal pourrait mettre en danger le personnel américain.

La messagerie Signal pas approuvée pour partager des informations militaires

Signal est utilisé pour « planifier des réunions et d’autres questions logistiques », mais jamais « pour des discussions détaillées et hautement confidentielles sur une action militaire en cours », écrit-il dans les pages de son média. La messagerie chiffrée n’est en effet pas approuvée par l’administration américaine pour le partage « d’informations classifiées » comme des informations militaires. Les hauts fonctionnaires doivent utiliser des outils spécifiques et via des équipements gouvernementaux approuvés, selon des avocats interrogés par nos confrères.

L’information a été confirmée par la Maison-Blanche. « Il semble pour l’instant que la chaîne de messages dont fait état l’article soit authentique, et nous cherchons à savoir comment un numéro a été ajouté par erreur », a déclaré Brian Hughes, porte-parole du Conseil de sécurité nationale, dont les propos sont rapportés par La Presse. Pour Pete Hegseth, en charge de la Défense au sein du gouvernement Trump, le journaliste en question n’est qu’un « soi-disant journaliste sournois et très discrédité qui a fait profession de colporter des canulars à maintes reprises ». « Personne n’a envoyé de plans de guerre et c’est tout ce que j’ai à dire à ce sujet », a-t-il ajouté.

« Dites-moi que c’est une blague », a simplement commenté sur X Hillary Clinton, candidate malheureuse face à Donald Trump à la présidentielle de 2016. Celui qui était encore candidat n’avait cessé d’attaquer la femme politique sur des courriers électroniques officiels que cette dernière avait envoyés via une messagerie privée, alors qu’elle était secrétaire d’État. Mais pour Chuck Schumer, le chef de la minorité démocrate au Sénat américain, il s’agit de « l’une des fuites de renseignement militaire les plus stupéfiantes que j’ai lues depuis très, très longtemps ». L’homme politique appelle à une « enquête complète ». 

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